02. Contexte

“Le monde tel que nous l’avons connu n’est plus aujourd’hui. C’est une chose parfaitement ancrée dans l’esprit de tout le monde, et pourtant, tout le monde n’avait pas la même vision du monde. Tout le monde n’en connaissait pas son entièreté, n’avait pas conscience d’à quel point il pouvait être vaste, diversifié, inconnu. Les Contaminés ne sont pas les premiers morts-vivants à fouler le sol de cette planète, ils ne sont pas non plus les premières créatures tout droit sorties de divers romans que nous lisions pour nous évader. Ils n’en sont qu’une infime partie, permettant de révéler un monde qui a toujours été là, sous nos yeux, mais dont nous avons à présent totalement conscience, et que nous acceptons. Parce que quel autre choix nous reste-t-il? La seule façon de survivre est de le faire ensemble. Prédateurs et proies naturelles vivent en communauté pour leur survie, parce qu’ils sont plus forts ensemble. Voilà où nous en sommes. Certains voient cela comme une abomination, d’autres comme une chance de mettre nos différends de côté. Mais le fait est là. Ce choix ne nous appartient plus.”

Soupirant longuement, l’Inquisiteur referma son calepin, encore perdu dans ses pensées sombres, et sa responsabilité de protéger son peuple - du moins le peu qu’il en reste. Comme il a pu si bien le dire, le monde qu’ils avaient connu avant n’est plus. L’épidémie a pris son départ à la découverte d’une jarre étrange, dont tout le monde ignorait ce qu’elle contenait. Sa curiosité maladive l’a poussé à faire tout ce qui était en son pouvoir pour l’ouvrir et y découvrir le trésor qu’elle renfermait. Cupidité ou idiotie? Un mélange certain de ces deux choses qu’il n’est pas prêt d’assumer encore, faisant comme tout le monde, comme s’il ignorait totalement ce qui avait causé tout cela. Alors qu’il a cassé pratiquement toutes les armes de la Garde pour essayer d’ouvrir cette jarre, avant de contacter les sorciers les plus puissants qu’il connaissait pour en venir à bout, dans le plus sombre des secrets.

Après quelques recherches des trois sorciers qu’il avait engagé, l’Inquisiteur finit par découvrir qu’il avait mis la main sur la boîte de Pandore, objet légendaire renfermant l'espérance de l’humanité. Il y voyait là une façon de contrôler un peu plus les choses. Avoir main mise sur l’espérance était une chance qui ne se représenterait pas de sitôt. Et il ordonna alors aux sorciers d’ouvrir cette boîte à l’aide de leurs pouvoirs. Grossière erreur de sa part. L’espérance se trouvant soit disant au sein de cette jarre n’était en effet qu’une métaphore. Ce qui se trouvait à l’intérieur de cette jarre, c’était tout simplement les pires vices de l’humanité. Et une armée de démons prêts à semer le chaos sur leur passage. Ouvrir cette jarre répandit alors sur la planète une épidémie, contaminant les vivants en rendant leur sang noir, et en les rendant fous, jusqu’à leur mort. Personne ne se retrouve à l’abri. N’importe qui peut être contaminé, et devenir son propre cauchemar.

Tout a été très rapide. Les premiers contaminés ont fait des hôpitaux une zone de guerre. Les plus intelligents ont fui rapidement, s’éloignant le plus possible de la ville, pour leur survie. Les plus courageux sont restés pour se battre, pensant à quelque chose d’éphémère. Sauf que ça ne l’était pas. Les rues de New York sont mortes, remplies d’âmes en peine, dangereuses, infranchissables. Plus aucune âme vivante ne foulent ces terres. L’Institut est en ruine, autant aux yeux des Terrestres que du Monde Obscure. Le voile n’existe d’ailleurs plus. Tout le monde se doit de s’entraider pour survivre. Il en devient impossible de le faire seul. Les différents doivent être mis de côté, tout le monde doit apprendre à vivre avec l’autre et à l’accepter. Ce n’est pas quelque chose de simple tous les jours, mais personne n’a vraiment le choix.

Cela fait à présent cinq mois que l’épidémie a commencé. Personne ne sait encore ce qu’il s’est réellement passé. Plusieurs camps de réfugiés se sont créés, dans la campagne américaine de la côte est. Certains se trouvent en bord de mer, d’autres à une centaine de kilomètres, perdue en pleine forêt, se pensant à l'abri. D’autres au sein d’un bâtiment qui tient encore debout, isolé du monde par sécurité de confidentialité, à la base, et maintenant par sécurité simple. Et il y a ceux qui se déplacent, seuls ou en groupe, sans jamais s’arrêter, cherchant toujours un coin pour se mettre à l’abri, de quoi se nourrir. Mais ils partagent tous ce même instinct de survie, cette même envie de vivre qui les pousse encore à se battre. Pendant combien de temps? ils n’en savent rien, tout comme ils ne savent pas si les choses vont finir par s’arranger. Mais ils vivent au jour le jour, et écrivent progressivement leur histoire.